Il était une fois le dévoilement du Porsche Cayenne, premier véhicule à porter le nom Porsche sans être une voiture sport ou une voiture de course en plus d’un demi-siècle. Et pour les petits malins, sachez que les tracteurs de ferme des années 50 ne comptent pas.
C’était il y a 20 ans, au Mondial de l’auto à Paris. Le grand spécialiste de Zuffenhausen voulait se protéger de l’instabilité et la précarité extrêmes du marché des sportives en diversifiant son offre. Il a donc choisi de créer un VUS à sa manière pour profiter de la montée irrésistible de ce type de véhicule. Surtout en Amérique.
La moitié du monde s’est aussitôt scandalisée de voir Porsche lancer un véhicule à quatre portières lourd et haut sur pattes, aux antipodes des principes de légèreté et d’efficacité que la marque avait toujours défendus. L’autre moitié s’est mis les mains devant les yeux, parce que ce premier Cayenne n’était pas un modèle de finesse et de beauté. J’exagère à peine, dans les deux cas.
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Succès en continuJoli ou pas, le Cayenne connut un succès immédiat grâce à son comportement solide, aux performances de ses V8 de 4,5 litres et au prestige de son nom. À défaut de battre des records de vente, les Cayenne rapportaient de gros profits. La version Turbo s’imposa également comme le nouveau coq de la catégorie, avec son V8 biturbo de 444 chevaux. Bref, c’était bien parti.
Nettement plus élégante, allégée de 250 kg et proposée avec une motorisation variée, la deuxième génération poursuivit sa montée dès 2011. Et la troisième, lancée en 2019, a fait de même. Plus long, large et spacieux, le Cayenne actuel est malgré tout plus léger de 55 kg, grâce à sa carrosserie en aluminium et à une structure riche en alliages divers.
Les Porsche Cayenne sont d’ailleurs construits désormais sur l’architecture MLB Evo qu’ils partagent avec les Audi Q7 et Q8, le Bentley Bentayga et le Lamborghini Urus au sein de la famille du géant Volkswagen. Parce que toutes les marques de prestige, ou presque, ont fini par imiter Porsche. Parmi elles, Aston Martin, Maserati, Rolls-Royce et même Ferrari, dont le Purosangue a été déclaré en rupture de stock quelques jours après son lancement.
À sa juste placeAvec la multiplication des rivales, il n’est pas étonnant que Porsche ait voulu reconfirmer la place unique qu’occupe son Cayenne dans le créneau sélect des VUS de prestige. Comme la 911 Turbo S qui tient tête, sinon mieux, à des bolides exotiques et hypersportifs deux ou trois fois plus chers.
Avec une série comprenant 19 variantes, Porsche peut facilement confier une mission spécifique à une seule version de son précieux VUS. Comme ces soldats d’élite, suprêmement efficaces, dont les exploits enrichissent les scénaristes et producteurs à Hollywood. C’est assurément le cas pour le Turbo GT qui a débarqué plus tôt cette année, uniquement sous les traits profilés du coupé Cayenne.
Malgré son allure paisible, ce rejeton survitaminé et soigneusement affiné par les sorciers de Weissach est devenu le VUS le plus rapide de tous au légendaire Nürburgring. La chose fut confirmée, le 14 juin 2021, par un chrono de 7,38 minutes qui constitue un nouveau record, dûment notarié, sur la Boucle Nord de 20,832 km (Nordschleife en allemand).
Tout pour la missionPorsche n’appose pas les initiales « GT » à la légère. Pour faire du Turbo GT une bête de circuit, les ingénieurs ont renforcé les organes internes de son V8 biturbo de 4,0 litres et porté sa puissance à 631 chevaux, en soignant son endurance. L’échappement en titane, avec une paire de gros embouts ovales, lui est exclusif. La boîte automatique à 8 rapports a été modifiée pour les passer plus rapidement, l’antipatinage a été retouché et le boîtier de transfert est dorénavant refroidi par liquide.
Maintenue par des ressorts pneumatiques raffermis de 15%, la carrosserie du Turbo GT est plus basse de 17 mm que celle du Turbo. Ses jantes dorées de 22 pouces, chaussées de pneus Pirelli P Zero Corsa, ont un angle de carrossage négatif accru de 0,45 degré pour augmenter l’adhérence en virage. Les roues arrière directrices et des transferts de couple plus nets à l’essieu arrière améliorent autant l’agilité que la stabilité.
Le freinage est assuré par d’immenses disques carbone-céramique de 440 mm (17,3 pouces) à l’avant, pincés par des étriers à dix pistons, et des disques arrière de 410 mm avec étriers à quatre pistons. Leur endurance et leur résistance sont telles qu’il a fallu deux séances pour obtenir une distance d’arrêt correcte de 36,53 mètres, en freinage d’urgence à 100 km/h. Et là encore, seulement en freinant énergiquement entre les essais pour conserver leur chaleur. Du jamais vu, en plus de trente années de mesures, parce que ces freins sont conçus pour un maximum d’efficacité en service extrême dans un véhicule de 2 220 kg.
Connaître la bêtePas de record non plus en accélération, malgré une deuxième séance et l’ajout d’un rehausseur d’octane pour disposer de la meilleure qualité d’essence. Le Turbo GT a effectivement abattu le sprint de 0 à 100 km/h en 3,95 secondes, franchi le quart de mille en 11,95 secondes à 196,9 km/h et a bondi de 80 à 120 km/h en 2,85 secondes.
Il est rare de ne pas égaler ou surpasser les temps annoncés par Porsche, qui promet un chrono de 3,3 secondes pour le 0 à 100 km/h dans le cas du Turbo GT. Il faut dire que son V8 met une fraction de seconde à se dégourdir en accélération et ne donne toute sa mesure qu’à plus haut régime. Il s’anime toutefois instantanément en mode Sport et c’est mieux encore en Sport +. Comme toujours chez Porsche.
À tout moment, le roulement est très ferme à bord. La tenue en virage est assez diabolique, la direction précise, nette et vive. Le Turbo GT vire rigoureusement à plat, avec le mordant immense des P Zero Corsa. La sensation de compacité et d’agilité est renforcée par les quatre roues directrices. En mode Sport +, l’essieu arrière se place à l’accélérateur, sans nervosité, de façon très naturelle. On apprécie alors d’autant mieux l’excellent maintien des sièges très sculptés, même aux deux places arrière.
En somme, le Turbo GT est au Cayenne ce que la GT3 est à la mythique 911. Une machine sportive sans compromis qui peut affronter les circuits avec un aplomb inégalé. C’est le modèle le plus cher de cette série. Le prix de notre spécimen d’essai était de 228 910 $, options et frais inclus.
C’est comme les pays qui veulent s’assurer la « supériorité aérienne » grâce aux meilleurs chasseurs supersoniques. Il faut seulement savoir dans quoi on s’embarque. Sans mission spéciale à réussir, vous serez sans doute parfaitement heureux dans un Cayenne GTS Coupé de 136 900 $, conçu selon la même philosophie.
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Source : GuideAutoWeb.com, par Marc Lachapelle
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