Depuis quelque temps, sur Internet, je m’amuse à éplucher les annonces concernant certaines voitures. Des modèles convoités et difficiles à obtenir, qui font l’objet de surenchères. Naturellement, la Chevrolet Corvette de dernière génération est l’exemple le plus flagrant. Son prix peut grosso modo varier de 75 000 $ à 110 000 $, mais on la revend entre 125 000 $ et 150 000 $.
Évidemment, il serait délicat pour un concessionnaire Chevrolet de commander des voitures, de les recevoir et de les vendre 50 000 $ au-delà de la facture. Une pratique que l’on remarque chez les Américains où des frais « d’ajustement de marché » peuvent être ajoutés... En revanche, un concessionnaire ne peut officiellement vendre au Québec un véhicule au-delà de son prix de détail suggéré.
Ces gens ont cependant plus d’un tour dans leur sac et jouent d’astuces pour contourner les règles. Par exemple, un propriétaire de concession Chevrolet possédant aussi d’autres bannières pourrait recevoir une Corvette neuve, la vendre à une autre de ses concessions qui pourrait alors la revendre en surenchère. On pourrait également en faire un « démo » en la faisant rouler 1 500 ou 2 000 km pour qu’elle ne soit plus vendue comme une voiture neuve, ce qui permet de jouer avec la facture.
En naviguant sur Internet, vous remarquerez que la majorité des Corvette à vendre ne sont pas vendues par des concessions Chevrolet. Car les propriétaires de ces commerces peuvent difficilement vendre au détail une auto neuve à 85 000 $, et vendre l’équivalent « d’occasion » pour 40 000 $ ou 50 000 $. Ne vous en faites pas, ils feront du profit avec ces voitures en les revendant à d’autres commerces ou encore aux États-Unis.
J’ai pu toutefois constater ces dernières semaines que certains concessionnaires tentent d’avoir le beurre et l’argent du beurre. Par exemple, des concessions Volkswagen qui affichent des Golf R « usagées » de 2 000 ou 4 000 km, à 15 000 $ ou 18 000 $ au-delà de la facture. Des bagnoles qui ne sont clairement pas des modèles d’occasion repris en échange, mais plutôt des voitures neuves que l’on a fait rouler pour les revendre en fonction de la « loi du marché ».
Pendant ce temps, plusieurs acheteurs qui ont passé une commande (et j’en suis), patientent pour obtenir la leur. On peut ainsi en conclure que certains concessionnaires mettent la main sur des commandes de clients pour accaparer les véhicules dans le but de les revendre en surenchère.
Cela explique donc l’attente démesurément longue pour l’obtention de certains modèles, et ce ne sont pas que des sportives. Pensez aux Kia Telluride, Ford Bronco et particulièrement, au Toyota RAV4 Prime. Un véhicule pour lequel on patiente plus de deux ans et qui peut se revendre à 70 000 $ ou 75 000 $, sans être admissible à des crédits gouvernementaux. Normalement, pour un tel modèle (XSE Technologie), on débourserait environ 57 000 $, pour ensuite retirer 10 000 $ de crédits gouvernementaux.
Rejoints au téléphone, les représentants de différents constructeurs admettent qu’il s’agit d’un problème.L’explication reçue est que les concessionnaires sont maîtres de leurs actions et donc libres de vendre en surenchère, alors que d’autres étudient la possibilité de prendre des mesures beaucoup plus draconiennes pour enrayer le fléau. Cela pourrait notamment signifier moins de modèles alloués aux concessionnaires qui s’avantagent au profit de leurs clients.
Néanmoins, cette « loi du marché » est temporaire et ceux qui accepteront de débourser 70 000 $ pour un RAV4 Prime devront subir d’ici peu une très forte dépréciation. Bien sûr, le client est libre d’effectuer ou non la transaction, mais il risque ensuite d’en garder un goût amer, ou de souffrir de ce que l’on appelle le « syndrome post-achat ».
Je l’admets, je patiente toujours pour cette Golf R commandée il y a près d’un an et qui n’est visiblement pas près de toucher le sol québécois. Et cela me frustre de voir que des directeurs de concession acceptent de faire de la concurrence déloyale face à leurs propres clients. Maintenant, je comprends aussi que ces concessionnaires ne sont pas plus fous que d’autres et qu’ils préfèrent surfer sur la vague plutôt que de laisser l’opportunité à des revendeurs, ou même à leurs propres clients, de faire du profit. Voilà pourquoi je suis d’avis que les constructeurs doivent mettre leur pied par terre et trouver une façon de régulariser la situation. Sans quoi, le prix de détail suggéré du manufacturier pourrait réellement ne devenir qu’une suggestion...
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Source : GuideAutoWeb.com, par Antoine Joubert
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